Organiser la reprise (4) : CSE et document unique d’évaluation des risques

Organiser la reprise (4) : CSE et document unique d’évaluation des risques

 

Par Claire CHESNEAU, avocat, MGG VOLTAIRE

 

Trois décisions des tribunaux judiciaires de Lille, Paris et Nanterre des 3, 9 et 14 avril 2020 ont été rendues en matière d’évaluation des risques professionnels inhérents à la pandémie de Covid-19.

 

Dans ces décisions, les juges ont notamment été amenés à enjoindre les employeurs d’actualiser leur évaluation des risques, en y associant les représentants du personnel.

 

L’article R. 4121-2 du Code du travail impose la mise à jour du DUER notamment lors de toute décision d’aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail, au sens de l’article L. 4612-8, ou encore lorsqu’une information supplémentaire intéressant l’évaluation d’un risque dans une unité de travail est recueillie.

 

Or, le risque pandémique correspond bien à ces deux hypothèses et nécessite en conséquence une actualisation du DUER. 

 

Le Code du travail ne prévoit toutefois pas d’obligation spécifique de consultation du CSE sur la modification du DUER en tant que telle, mais uniquement une obligation de mise à disposition de ce document (auprès notamment des travailleurs, membres du CSE, médecin du travail et professionnels de santé, inspection du travail ou encore agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale et organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail – article R. 4121-4 du CT).

 

Dans son question réponse (lequel est, rappelons-le, dépourvu de valeur juridique), le Gouvernement a pour sa part estimé que l’actualisation du DUER, nécessaire du fait de l’épidémie actuelle liée au Covid-19, devait faire l’objet d’une consultation du CSE.

 

La circulaire du 18 avril 2002 (citée dans la décision AMAZON) évoquait pour sa part une « association » des représentants du personnel dans l’élaboration du DUER, dans la mesure où ils ont pour mission de procéder à l’analyse des risques, sans mentionner une quelconque obligation de consulter, au sens où un avis doit être recueilli. Dans sa décision, le Tribunal de Nanterre a d’ailleurs uniquement reproché à AMAZON de ne pas avoir associé ses représentants du personnel à l’élaboration du DUER, sans mentionner un quelconque manquement au titre d’une consultation qui n’aurait pas été menée.  

 

L’article L. 2312-9 du Code du travail prévoit d’ailleurs que le CSE, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, dispose notamment d’attributions générales dans le champ de la santé, de la sécurité et des conditions de travail, et procède dans ce cadre à l’analyse des risques professionnels et notamment ceux liés aux facteurs de risques professionnels mentionnés à l’article L. 4161-1 qui vise expressément « un environnement physique agressif » comme les agents chimiques dangereux, auquel le Covid-19 est assimilé par les Tribunaux.

 

De même, dans les entreprises de moins de 50 salariés, le CSE « contribue à promouvoir la santé, la sécurité et l’amélioration des conditions de travail » (L. 2312-5 du CT).

 

La consultation du CSE sur une simple « actualisation » du DUER est donc sujette a minima à débat et ce d’autant que ce document peut être amené à être fréquemment modifié (ce qui serait alors peu compatible avec les délais dont le CSE dispose pour émettre un avis).

 

En toute hypothèse, il convient toutefois de noter que la consultation du CSE s’impose en cas de projet important modifiant les conditions de santé sécurité et conditions de travail qui nécessite alors d’actualiser le DUER.

 

L’employeur a par ailleurs intérêt à mettre à jour avec précaution le DUER dans la mesure où il sert à l’élaboration du bilan HSCT et du programme annuel de prévention sur lequel le CSE doit être consulté dans le cadre de la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi (R. 4121-3 du CT)

 

L’association du CSE sur le DUER présente en tout état de cause un intérêt double tenant, d’une part, à la mise en œuvre des compétences pouvant contribuer à la réalisation de l’évaluation des risques et, d’autre part, au dialogue social.

 

L’association des représentants du personnel à l’actualisation du DUER devrait en outre favoriser une meilleure communication interne sur les mesures applicables qui devraient donc être mieux respectées et limiter les risques de droits d’alerte ou de réclamations en matière de santé et de sécurité.  

 

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