Précisions sur l’organisation des enquêtes internes faisant suite à des accusations de harcèlement moral

Aux termes de son arrêt rendu le 8 janvier 2020, la Cour de cassation a précisé quelles étaient les obligations de l’employeur lorsque ce dernier diligentait une enquête interne après des accusations de harcèlement moral (Cass. soc. 8 janvier 2020, n°18-20151).

En l’espèce, un salarié avait été licencié pour faute grave en raison d’agissements de harcèlement moral envers tous ses collaborateurs.

Dans le cadre de l’enquête interne mise en oeuvre à la suite des accusations de harcèlement moral, l’employeur avait entendu une partie seulement des collaborateurs sous ses ordres. Alors que le salarié accusé de harcèlement moral gérait 13 personnes réparties sur deux services, seules 8 personnes avaient ainsi été interrogées dans le cadre de l’enquête interne, les salariés appartenant presque tous à un seul des deux services géré par le salarié accusé de harcèlement moral.

La Cour d’appel ayant relevé que l’enquête n’avait pas amené à interroger l’ensemble des salariés sous les ordres du supposé harceleur alors que ce dernier avait été licencié pour faute grave en raison d’agissements de harcèlement moral envers “tous” ses collaborateurs, elle en a déduit que l’enquête interne ne répondait pas à aux exigences d’exhaustivité et d’impartialité et a en conséquence écarté l’enquête interne des débats, concluant que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La Chambre sociale a cassé cet arrêt de la Cour d’appel et refusé d’écarter des débats les résultats de l’enquête.

Il apparaît ainsi que l’employeur n’est pas tenu de diligenter une enquête auprès de l’intégralité des salariés susceptibles de subir ou d’attester de l’existence d’un harcèlement moral.

L’employeur peut ainsi limiter les entretiens dans le cadre de son enquête et caractériser la réalité d’un harcèlement après l’audition d’une partie seulement des salariés travaillant avec le supposé harceleur.

En pratique, en cas de comptes-rendus très divergents après les premiers entretiens, l’employeur peut toutefois avoir intérêt à interroger le plus de salariés possibles dans le cadre de son enquête afin d’affiner au mieux les éventuelles sanctions ou mesures préventives à prendre.

Il est en tout état de cause généralement recommandé à l’employeur de systématiquement demander aux plaignants et aux supposés harceleurs l’identité des salariés susceptibles de confirmer leurs dires et d’interroger les personnes citées dans le cadre de l’enquête.

A cet égard, rappelons que la Cour de cassation, dans un arrêt du 27 novembre 2019, a jugé que l’obligation de prévention des risques professionnels incombant à l’employeur était indépendante de la prohibition des faits de harcèlement moral et qu’en conséquence, le fait qu’aucun agissement de harcèlement moral ne soit établi n’exonérait pas l’employeur de son obligation de prévention, à laquelle il pouvait manquer en ne diligentant aucune enquête après une dénonciation à ce titre (Cass. soc., 27 nov. 2019, n° 18-10.551).

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000041482086&fastReqId=1229483304&fastPos=1

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