Télétravail et indemnité d’occupation du domicile : une évolution jurisprudentielle à surveiller
Dans un arrêt du 19 mars 2025 (Cass. soc., 19 mars 2025, n° 22-17.315), la Cour de cassation apporte une clarification importante sur le délai de prescription applicable à l’action en paiement d’une indemnité d’occupation.
A cette occasion, elle semble également esquisser une évolution jurisprudentielle quant aux situations ouvrant droit à cette indemnité, potentiellement au bénéfice de nombreux télétravailleurs.
L’application de la prescription biennale confirmée
Cet arrêt précise que l’action en paiement de l’indemnité d’occupation relève de l’exécution du contrat de travail et doit donc se prescrire par deux ans, conformément à l’article L. 1471-1 du Code du travail. Ainsi, la Cour casse la décision d’appel qui avait retenu une prescription quinquennale de droit commun, confirmant ainsi une application stricte du délai biennal en matière de salaires et d’indemnités assimilées.
Une extension du droit à une indemnité d’occupation ?
Bien que seulement saisie sur la question de la prescription, la Cour de cassation rappelle le principe établi selon lequel l’occupation du domicile à des fins professionnelles constitue une immixtion dans la vie privée du salarié. Elle affirme ensuite que le salarié « peut prétendre à une indemnité à ce titre dès lors qu’un local professionnel n’est pas mis effectivement à sa disposition ou qu’il a été convenu que le travail s’effectue sous la forme du télétravail ».
Jusqu’à présent, l’indemnité d’occupation du domicile n’était accordée qu’aux salariés contraints de travailler depuis leur domicile, faute de local professionnel disponible (Cass. soc., 4 décembre 2013, n° 12-19.667 ; Cass. soc., 21 septembre 2016, n° 15-11.144 ; Cass. soc., 27 mars 2019, n° 17-21.014).
L’arrêt du 19 mars 2025 pourrait marquer une inflexion en reconnaissant un droit à indemnisation, y compris lorsque le télétravail est volontaire, dès lors qu’aucun local professionnel n’est effectivement accessible ou que l’exécution du travail à distance a été prévue par contrat ou accord collectif.
Une jurisprudence encore à confirmer
Toutefois, cette interprétation devra être consolidée par d’autres décisions pour en apprécier pleinement la portée. L’arrêt ne consacre pas un droit automatique à indemnisation pour tous les télétravailleurs, mais il ouvre une brèche qui pourrait influencer les contentieux futurs.
Les employeurs devront suivre avec attention l’évolution de la jurisprudence et, si nécessaire, adapter leurs pratiques en matière de prise en charge des frais professionnels liés au télétravail.
Cass. soc., 19 mars 2025, n° 22-17.315, publié au Bulletin