passe sanitaire et salariés protégés : chronique d’une rentrée compliquée…

L’article 1er de la loi du 5 août relative à la gestion de la crise sanitaire prévoit l’obligation, pour l’employeur, de suspendre le contrat de travail de tout salarié soumis à l’obligation de justifier d’un passe sanitaire pour exercer les missions qui lui sont confiées, le législateur n’ayant prévu aucune disposition spécifique pour les salariés protégés.

 

Il apparait en conséquence que le salarié protégé ne peut pas s’opposer à la suspension de son contrat de travail, qui peut lui être imposée par l’employeur.

 

•                   Concernant les conséquences d’une telle suspension du contrat de travail d’un salarié protégé sur l’exercice de son mandat

 

Le “Questions/Réponses” publié par le Ministère du Travail le 9 août 2021 précise que cette suspension est sans effet sur ses mandats (de manière générale, la suspension d’un contrat de travail, quel qu’en soit le motif, n’emporte d’ailleurs pas suspension du mandat). Le Ministère précise en conséquence que le salarié protégé doit pouvoir continuer à exercer ses mandats pendant la suspension de son contrat. Se pose toutefois la question des conditions dans lesquelles le salarié protégé peut continuer à exercer son mandat alors que, dans de nombreux cas, il risque de ne pas pouvoir se rendre physiquement sur son lieu de travail, à défaut de justifier d’un passe sanitaire. Il nous semble en effet que l’employeur serait en droit de refuser l’accès du salarié protégé sur le site qui serait soumis à une obligation de détention du passe sanitaire, si ce dernier n’en dispose pas, nonobstant la liberté de circulation inhérente au mandat de représentation du personnel.

 

Le salarié qui souhaiterait toutefois « imposer » sa venue sur site pourrait-il alors invoquer les dispositions relatives à une « tâche ponctuelle », qui permet à des personnes intervenant sur des sites soumis à l’obligation du passe sanitaire de se présenter sans passe pour une intervention « brève et non récurrente » ? Le salarié protégé pourrait en effet considérer que l’exercice de son mandat n’est pas lié à « l’activité normale et permanente » de l’entreprise, ce qui est néanmoins discutable.

 

La loi et le “Questions/Réponses” du Ministère sont muets sur ce point. Le Ministère sous-entend toutefois que le salarié protégé ne pourrait pas se présenter sur site en l’absence de passe sanitaire pour exercer son mandat, le “Questions/Réponses” précisant que pour concilier la liberté syndicale et le respect des obligations légales, l’employeur peut aménager les modalités d’exercice du dialogue social, notamment en facilitant les échanges à distance. En cas de suspension du contrat de travail d’un (ou de plusieurs) salariés protégés, l’employeur devra en conséquence tenter d’aménager les modalités d’organisation des réunions, afin de permettre aux représentants du personnel qui ne pourraient plus se rendre physiquement sur site d’y participer. Une telle organisation du dialogue social en distanciel pourrait toutefois s’avérer difficile à mettre en œuvre, notamment pour les négociations annuelles obligatoires, surtout si seul un très faible nombre de représentants du personnel n’a pas de passe sanitaire. L’organisation des réunions pourrait ainsi utilement être débattue avec les représentants du personnel, selon le nombre de personnes concernées par ces contraintes.

 

•                   Concernant l’obligation pour l’employeur de chercher des possibilités d’affectation, en cas de suspension du contrat

 

En cas de suspension du contrat de travail du salarié soumis à l’obligation de détenir un passe sanitaire dont il ne justifierait pas, l’employeur est par ailleurs en principe tenu d’examiner les moyens de sa situation, notamment les possibilités d’affectation, le cas échéant temporaire, au sein de l’entreprise sur un autre poste non soumis à l’obligation de détenir un passe sanitaire. Le salarié protégé dont le contrat est suspendu devant en principe pouvoir continuer à exercer son mandat, il conviendra selon nous que l’employeur s’assure que les éventuelles solutions de réaffectations identifiées restent compatibles avec l’exercice de son mandat et ne soit pas susceptibles d’emporter la cessation du mandat. L’employeur ne devrait toutefois pas, selon nous, restreindre ses recherches aux seules possibilités d’affectation n’emportant pas cessation du mandat. Le cas échéant, les éventuels impacts des affectations proposées sur le mandat devraient selon nous être précisés au salarié lors de la proposition des solutions identifiées.

 

En l’absence d’accord entre le salarié protégé et l’employeur sur une possible affectation sur un autre poste (qui permettrait notamment la reprise du versement d’une rémunération), le contrat du salarié protégé serait en principe toujours suspendu. Comme pour les salariés non protégés (nous vous invitons sur ce point à relire notre post « Loi relative à la gestion de la crise sanitaire (1) : la question du licenciement des salariés en CDI sans passe sanitaire »), se pose la question de la possibilité de lancer une procédure de licenciement en cas de refus du salarié de remplir son obligation vaccinale ou de présenter un passe sanitaire valide lorsqu’il est requis, en l’absence de solution de réaffectation. L’employeur pourrait formuler une demande d’autorisation de licenciement sur le fondement de l’absence prolongée de nature à perturber le bon fonctionnement de l’entreprise. L’administration risque toutefois de refuser une telle demande, dans l’hypothèse où elle considèrerait que la durée de l’absence n’est pas suffisamment longue, ou que la perturbation du bon fonctionnement de l’entreprise n’est pas caractérisée. 

 

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