Lors de la conférence de presse du lundi 27 décembre dernier, le gouvernement a annoncé que pour faire face aux deux vagues simultanées des variants Delta et Omicron, une adaptation des mesures sanitaires est nécessaire (https://www.gouvernement.fr/info-coronavirus).
Pour ce qui est du milieu professionnel, le Gouvernement a indiqué qu’à compter du 3 janvier 2022, le recours au télétravail serait rendu obligatoire 3 jours par semaine pour tous les salariés éligibles avec un recours jusqu’à 4 jours par semaine « lorsque cela est possible ».
Au cours d’une réunion avec les partenaires sociaux le 28 décembre dernier, la Ministre du Travail, Élisabeth Borne, a annoncé que les entreprises récalcitrantes au télétravail seraient sanctionnées par le paiement d’amendes administratives.
Selon le Gouvernement, un amendement au projet de loi n°4857 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique devrait être déposé pour inscrire cette sanction dans la loi.
Compte tenu du flou existant à ce jour, MGG Voltaire fait le point sur la situation :
Qu’en est-il aujourd’hui de l’obligation de recourir au télétravail pour faire face à la pandémie de Covid-19 ?
Aux termes de l’article L.4121-1 du Code du travail, l’employeur doit prendre les mesures requises pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentales de ses salariés.
Au regard de la situation sanitaire actuelle, le télétravail s’impose effectivement comme l’une des mesures permettant le respect de cette obligation de sécurité puisqu’il permet d’éviter le déplacement des salariés (et donc éventuellement l’usage des transports en commun) et la contamination sur le lieu du travail.
L’article L.1221-11 du Code du travail dispose d’ailleurs : « En cas de circonstances exceptionnelles, notamment de menace d’épidémie, ou en cas de force majeure, la mise en œuvre du télétravail peut être considérée comme un aménagement du poste de travail rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés. »
C’est en application de cet article qu’avait été imposé le télétravail lors de la première vague de Covid-19 en mars 2020.
Les mois écoulés et les vagues successives de Covid-19 permettent aujourd’hui de constater que le télétravail n’est pas la seule mesure assurant la protection de la sécurité des salariés en milieu professionnel.
Le port de masque, les mesures d’hygiène (utilisation de gel, lavage des mains), la distanciation ou l’aération des pièces de travail sont autant de mesures – d’ailleurs contenues dans le protocole national pour assurer la santé et la sécurité des salariés en entreprise – qui permettent à l’employeur de respecter son obligation de sécurité.
L’absence de recours systématique au télétravail, éprouvé par certains salariés comme une réelle contrainte, participe donc dans certains cas à la protection de la santé psychique des salariés.
A ce jour, aucune disposition légale n’impose le recours systématique au télétravail pour les salariés éligibles.
Que se passera-t-il le 3 janvier en cas de modification du protocole sanitaire ?
Selon les déclarations de la Ministre du travail, le protocole sanitaire devrait être mis à jour le jeudi 30 décembre prochain pour faire état de cette obligation de recourir au télétravail pour les postes éligibles.
Pour autant, le Conseil d’Etat dans sa décision du 17 décembre 2020 (https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000042713095?init=true&page=1&query=446797&searchField=ALL&tab_selection=all) a confirmé que le protocole sanitaire n’est qu’un « ensemble de recommandations pour la déclinaison matérielle de l’obligation de sécurité de l’employeur dans le cadre de l’épidémie de covid-19 en rappelant les obligations qui existent en vertu du code du travail. »
« Le protocole a pour seul objet d’accompagner les employeurs dans leurs obligations d’assurer la sécurité et la santé de leurs salariés au vu des connaissances scientifiques sur les modes de transmission du SARS-CoV-2 et n’a pas vocation à se substituer à l’employeur dans l’évaluation des risques et la mise en place des mesures de prévention adéquate dans l’entreprise. »
La simple absence de recours au télétravail, sans constat d’un non-respect de l’obligation de sécurité, ne pourrait donc – même en cas de modification du protocole sanitaire – justifier une sanction de l’employeur.
Que se passerait-t-il en cas de modification de la loi ?
D’après les premiers retours des échanges avec les partenaires sociaux, une amende de 2.000 euros par salarié « à la main du Directeur régional du travail » pourrait être encourue par les employeurs récalcitrants
Pour l’heure, aucun amendement au projet de loi n°4857 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le Code de la santé publique n’a encore été déposé visant à sanctionner les employeurs n’ayant pas recours au télétravail.
Par ailleurs, l’objectif affiché étant que la loi entre en vigueur le 15 janvier, il ne sera pas possible avant cette date de sanctionner des entreprises sur la base d’un texte non encore promulgué.
Enfin, la validité d’un tel amendement pourrait être débattue lors du contrôle par le contrôle du Conseil constitutionnel ou du Conseil d’Etat.