ACCIDENT EN TELETRAVAIL – LA SEULE PAROLE DU SALARIE NE SUFFIT PAS

La Cour d’appel de Rouen a récemment eu à connaître d’une demande de reconnaissance du caractère professionnel d’un accident intervenu en télétravail.

Pour mémoire, l’article L. 411-1 du Code de la Sécurité Sociale prévoit une présomption d’imputabilité d’un accident au travail lorsque celui-ci survient « par le fait ou à l’occasion du travail ». Pour bénéficier de cette présomption, la jurisprudence considère que l’accident doit être survenu au temps et au lieu de travail.

L’article L. 1222-9 du Code du travail précise quant à lui que l’accident survenu sur le lieu où est exercé le télétravail pendant l’exercice de l’activité professionnelle du télétravailleur est présumé être un accident de travail.

FAITS & PROCEDURE

En l’espèce, une salariée en télétravail est retrouvée inanimée dans son bureau par son fils. Une collègue attestait que la victime se reconnectait toujours avant 13h30. La salariée indiquait elle-même qu’elle se trouvait dans la pièce de son logement dédiée au télétravail. Elle sollicitait en conséquence la reconnaissance d’un accident du travail.

La Caisse Primaire d’Assurance Maladie (« CPAM ») a dans un premier temps notifié à la salariée son refus de reconnaitre un caractère professionnel à l’accident. La salariée a contesté cette décision devant la Commission de recours amiable compétente. Suite à une décision implicite de rejet, la salariée a saisi le tribunal Judiciaire d’Evreux, lequel a reconnu le caractère professionnel de l’accident subi par la salariée. La CPAM a formé appel.

SOLUTION

La Cour d’Appel de Rouen infirme la décision de première instance, et considère que l’accident est dépourvu de caractère professionnel.

Elle considère en effet que « le salarié qui entend se prévaloir d’une présomption d’imputabilité au travail n’a pas à démontrer la relation entre l’accident et le travail, mais doit rapporter la preuve que l’accident est survenu dans des circonstances conformes aux exigences légales. Il peut apporter cette preuve par tous moyens, mais ses seules affirmations ne sont pas suffisantes si elles ne sont pas corroborées par des éléments objectifs ».

La Cour relève en effet que la salariée n’apportait aucun élément probatoire établissant qu’elle se serait connectée au réseau de l’entreprise. Elle considérait également le fait que la salariée avait badgé le matin, mais pas l’après-midi, et qu’il n’était fait état d’aucune communication ou tâche effectuée à ce moment-là. Dès lors, la Cour en a déduit l’absence de caractère professionnel de l’accident. 

Cet arrêt démontre bien l’intérêt d’émettre des réserves motivées dans la déclaration d’accident du travail, en particulier lorsque les seuls éléments dont dispose l’entreprise sont les affirmations du salarié.

CA Rouen, 26 avril 2024, n°23/00840