Dans un arrêt du 24 janvier 2024 (n°22-19.752), la Cour de cassation offre une illustration nouvelle de l’appréciation qu’il convient de faire, en cas de changement de lieu de travail, des possibles modifications apportées au contrat de travail.
En l’espèce, l’employeur qui avait décidé d’une réaffectation géographique d’un salarié avait invoqué le fait que le nouveau lieu de travail du salarié se situait à une distance raisonnable de l’ancien, dans le même département et accessible par de grands axes routiers, considérant ainsi que le changement ne constituait pas une modification du contrat de travail nécessitant l’accord du salarié.
La Cour a toutefois écarté cette analyse en se fondant sur plusieurs constatations factuelles :
- Elle a relevé que les deux lieux de travail ne se situaient pas dans le même bassin d’emploi ;
- Elle a pris en considération les difficultés de covoiturage et l’accessibilité insuffisante aux transports en commun entre les deux communes, aux horaires de travail de la salariée concernée.
Ces éléments ont conduit la Cour à considérer que l’usage du véhicule personnel engendrait des contraintes supplémentaires pour la salariée, tant en termes de fatigue que de frais financiers, modifiant ainsi substantiellement les termes du contrat.
L’arrêt met ainsi en lumière deux aspects essentiels :
- Il confirme que le changement de lieu de travail peut constituer une modification du contrat de travail lorsque ce changement impose au salarié des contraintes qui altèrent l’équilibre contractuel initial ;
- Il rappelle que l’appréciation de telles modifications doit se faire au cas par cas, en tenant compte de l’ensemble des circonstances factuelles, et non sur la base de critères simplistes tels que la distance en kilomètres ou le temps de trajet en voiture.
Cette décision rappelle ainsi la nécessité d’une évaluation minutieuse de l’impact que peut avoir un changement de lieu de travail sur les salariés, en prenant en considération non seulement les aspects géographiques mais aussi les aspects pratiques liés aux conditions de transport et aux incidences financières pour le salarié.
Cass. soc., 24 janv. 2024, n° 22-19.752