Rédaction de la lettre de licenciement : l’absence de mention de la date des faits reprochés importe peu tant que ces derniers sont précis et matériellement vérifiables

Rédaction de la lettre de licenciement : l’absence de mention de la date des faits reprochés n’est pas une condition de validité tant que ces derniers sont précis et matériellement vérifiables

L’article L. 1232-6 du Code du travail dispose que la lettre de licenciement doit comporter l’énoncé des motifs invoqués par l’employeur. De jurisprudence constante, la Cour de cassation considère que le motif énoncé dans la lettre de licenciement doit être précis et matériellement vérifiable (Cass. Soc., 14 mai 1996, n°94-45.499).

L’absence d’énonciation d’un motif précis équivaut à une absence de motif, rendant ainsi le licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc., 17 janvier 2006, n°04-40.740).

La Cour de cassation vient cependant d’apporter, par un arrêt rendu le 31 janvier 2024, des précisions sur la notion de « motif précis ».

Faits et procédure

Un salarié embauché en 2015 avait été licencié pour faute grave en 2016. La lettre de licenciement mentionnait que l’employeur avait « découvert au mois de mai 2016 après témoignages, que (le salarié s’inscrivait) dans l’opposition et la remise en cause des directives de (sa) hiérarchie, (qu’il adoptait) un comportement inadapté dans (ses) relations de travail, et (qu’il avait) délibérément choisi de ne pas observer la réserve, la loyauté et l’exemplarité inhérentes à (son) poste […] ».

Considérant que les faits reprochés dans la lettre de licenciement – non datés – ne constituaient pas un motif suffisamment précis, le salarié a donc saisi la juridiction prud’homale.

Après le Conseil de prud’hommes, la Cour d’appel jugeait le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, considérant que la lettre manquait de précision, faute de mentionner la date des faits reprochés.

Décision

La Cour de Cassation a cassé l’arrêt d’appel, au motif que « si la lettre de licenciement doit énoncer des motifs précis et matériellement vérifiables, la datation des faits invoqués n’est pas nécessaire et l’employeur est en droit, en cas de contestation, d’invoquer toutes les circonstances de fait qui permettent de justifier ces motifs ».  

La Haute Cour, énonçant que la Cour d’Appel avait constaté que la lettre de licenciement énonçait des griefs précis et matériellement vérifiables pouvant être discutés devant les juges du fond, en tire donc les conséquences en considérant qu’il lui appartenait de vérifier le caractère réel et sérieux du licenciement.

Si, en théorie, la datation des faits reprochés n’est pas obligatoire, elle reste en pratique vivement recommandée afin de permettre de démontrer la réalité et la véracité des faits reprochés.

Il convient également de mentionner que, si les faits ne sont pas datés dans la lettre de licenciement, le salarié dispose d’un délai de 15 jours suivant la notification de son licenciement afin de demander des précisions sur les motifs invoqués dans la lettre de licenciement, ce qui peut, le cas échéant, également être l’occasion de dater les faits reprochés.

Cass. Soc., 31 janvier 2024, n°22-18.792