Inopposabilité d’un accord collectif à un salarié

Dans un arrêt du 31 janvier 2024, la Cour de cassation s’est prononcée clairement sur l’opposabilité aux salariés d’un accord collectif qui n’a pas été conclu dans le respect des conditions légales.

  1. Les faits

Un salarié avait été embauché en 2006 sous contrat à durée indéterminée à temps partiel.

En juin 2010, des élections professionnelles étaient organisées par son employeur. En juillet 2010, un accord d’entreprise était signé par son employeur avec les délégués syndicaux, prévoyant notamment une organisation du temps de travail sur 13 semaines.

En vertu de cet accord d’entreprise, l’employeur a en 2011 aménagé le temps de travail du salarié sur 13 semaines, par avenant à son contrat de travail.

En 2016, le salarié était licencié et saisissait la juridiction prud’homale pour solliciter notamment la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet.

  1. La procédure

Le salarié invoquait notamment l’inopposabilité de l’accord collectif d’entreprise signé en juillet 2010.

Le salarié soutenait notamment que les délégués syndicaux qui avaient signé l’accord collectif en juillet n’avaient pas été formellement re-désignés après les élections intervenues en juin. Le salarié considérait, par voie d’exception d’illégalité, que l’accord de juillet 2010 lui était inopposable dans la mesure où les signataires ne disposaient pas d’un mandat valable pour signer un accord collectif.

La Cour d’appel donnait raison au salarié, et requalifiait ainsi son contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein. Contestant cette décision, l’employeur s’est pourvu en cassation.

  1. La décision et sa portée

La Cour de cassation a approuvé la décision des juges du fond, retenant que :

  • Un salarié peut invoquer, par le biais d’une exception d’illégalité, un grief tiré du non-respect des conditions légales de validité relatives notamment à la qualité des parties signataires ;
  • En revanche, un salarié ne peut pas invoquer devant une juridiction un grief tiré des conditions dans lesquelles la négociation de l’accord a eu lieu par le biais d’une exception d’illégalité.

Cet arrêt offre une occasion de rappeler l’importance pour tout employeur de s’assurer, en amont de la signature de tout accord d’entreprise (et pas seulement d’un accord portant plan de sauvegarde de l’emploi), que les signataires syndicaux disposent d’un mandat valable.

https://www.courdecassation.fr/decision/65b9f0848452800008b2b347