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La durée d’une clause de non-concurrence ne peut être prolongée unilatéralement par l’employeur une fois la rupture intervenue

La vie est un long fleuve tranquille…sauf pour les clauses de non-concurrence qui encore et toujours font la une de l’actualité jurisprudentielle.

Nous savions que les conditions de validité de ces clauses sont strictement encadrées par la jurisprudence de la Cour de cassation qui depuis de nombreuses années se prête à un délicat exercice d’équilibriste, oscillant entre protection de la liberté contractuelle d’un côté et protection du droit AU travail des salariés de l’autre.

Dans le dernier cas soumis aux juges du droit, un employeur avait saisi les juridictions prud’homales d’une demande tendant à la condamnation d’une salariée démissionnaire au paiement de diverses indemnités à raison de la violation de sa clause de non-concurrence.

Les juridictions d’appel avaient décidé que la clause était licite et avait, ce faisant, condamné la salariée au paiement de la clause pénale qui était prescrite par cette clause.

La salariée forme toutefois un pourvoi et fait valoir, au visa des articles L. 1221-1 du Code du travail et 1134 du Code civil (dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016), que cette clause est en réalité nulle dès lors que (i.) l’employeur avait la faculté d’en étendre unilatéralement la durée et ce, y compris après la rupture du contrat de travail et que (ii.) la salariée était de ce fait placée dans l’incertitude quant à la durée exacte de son interdiction de non-concurrence, ce qui constituait une atteinte illégitime à sa liberté d’exercer une activité professionnelle.

Dans un arrêt du 13 septembre 2023, la Cour de cassation accueille les arguments de la salariée et casse l’arrêt d’appel (Cass. Soc., 13 sept. 2023, n°21-12.006).

Sur le fondement des mécanismes contractuels évoqués ci-dessus, la Haute Cour juge ainsi que la clause aux termes de laquelle l’employeur se réserve seul la faculté, après la rupture du contrat de travail « qui fixe les droits des parties », de renouveler la durée de l’interdiction de concurrence pour une durée égale à la durée initiale est nécessairement nulle.

Cette solution nous semble inédite et ce, à deux égards :

  • La Cour de cassation semble en premier lieu poser pour la première fois le principe selon lequel l’employeur ne saurait aménager contractuellement une faculté de renouvellement de la clause de non-concurrence (position qu’elle s’était jusqu’à présent refusée à tenir – cf. Cass. Soc., 21 sept. 2022, n°20-18.511).
  • La Cour de cassation semble conférer une sorte d’effet relatif au contrat de travail. Ainsi, l’employeur ne saurait créer de nouvelles obligations à la charge du Salarié (par exemple via une augmentation unilatérale de la durée d’une obligation de non-concurrence) alors que ce contrat a été rompu et que cette rupture « fixe [dans le temps] les droits des parties ».


Source : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000048085969?init=true&page=1&query=21-12.006&searchField=ALL&tab_selection=all