Prime d’ancienneté et absence pour maladie non rémunérée

Dans un arrêt du 2 avril 2025 (Cass. soc., 2 avril 2025 n° 23-22.190), la chambre sociale de la Cour de cassation a confirmé l’exclusion du bénéfice de la prime d’ancienneté en cas d’absence pour maladie non rémunérée, dès lors que la convention collective prévoit que ladite prime s’ajoute au salaire réel. Cette décision s’inscrit dans une jurisprudence constante qui conditionne le droit au versement de certaines primes à la perception effective d’une rémunération versée par l’employeur.

En l’espèce, un salarié, en arrêt de travail à la suite d’un accident, a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement après une longue période d’absence. Il a sollicité en justice le paiement rétroactif de la prime d’ancienneté sur la durée de son absence. Sa demande a été rejetée par le Conseil de prud’hommes, puis par la cour d’appel, et enfin par la Cour de cassation.

La Cour a considéré que, bien que l’article 15 de l’avenant « mensuels » à la convention collective régionale des industries métallurgiques de 1979 (applicable au litige) n’impose pas explicitement une condition de présence effective ou de rémunération, le fait que la prime soit définie comme s’ajoutant au « salaire réel » implique qu’elle n’est due que si le salaire est effectivement versé par l’employeur. En l’absence de maintien de salaire, le salarié ne peut donc pas prétendre à cette prime, les indemnités journalières de la sécurité sociale ne constituant pas un salaire au sens de ces dispositions.

La Haute juridiction distingue ainsi clairement entre absence rémunérée (où la prime peut subsister) et absence non rémunérée (où elle peut être exclue), dès lors que les textes conventionnels ou contractuels en font dépendre le versement du salaire perçu. Cette solution repose sur une interprétation rigoureuse de la notion de « rémunération » dans les conventions collectives, et rappelle que la simple appartenance à l’entreprise ou l’ancienneté ne suffit pas à ouvrir droit à une gratification, sauf stipulation contraire.

Cette solution n’est pas isolée : elle s’inscrit dans une lignée jurisprudentielle déjà affirmée (Cass. soc. 6 décembre 2017, n° 16-17.137 ; CA Versailles, 10 juin 2021, n° 19/02602 ; CA Paris, 14 décembre 2022, n° 20/03822), où les juridictions ont considéré que la condition d’ajout de la prime au salaire réel permettait d’en exclure le paiement en l’absence de rémunération versée. Ce raisonnement conserve toute sa pertinence dans le cadre de la nouvelle convention collective nationale de la métallurgie entrée en vigueur au 1er janvier 2024, dont l’article 142 reprend des termes similaires à l’ancien article 15, en indiquant que la prime d’ancienneté s’ajoute à la rémunération mensuelle.

En pratique, les employeurs doivent donc examiner avec rigueur les dispositions conventionnelles ou contractuelles applicables pour déterminer si une prime d’ancienneté (ou toute autre gratification) est due en cas d’absence pour maladie. À défaut de clause prévoyant expressément son maintien, et si la prime est rattachée à la rémunération effective, son versement peut légitimement être suspendu pendant la durée de l’absence non rémunérée.

Cass. soc., 2 avril 2025 n° 23-22.190