Le comité social et économique (CSE) peut avoir recours à un expert-comptable dans le cadre de ses consultation récurrentes sur les orientations stratégiques (article L. 2315-87 du Code du travail), sur la situation économique et financière (article L. 2315-88 du Code du travail) et sur la politique sociales de l’entreprise (article L. 2315-97 du Code du travail).
Les conditions d’intervention de l’expert-comptable dans l’entreprise sont à l’origine d’un abondant contentieux, que ce soit au sujet de sa rémunération (en témoigne encore la décision du 5 avril dernier – Cass. Soc., 5 avr. 2023, n°21-23.427 – par laquelle la Cour de cassation jugeait qu’il appartenait au seul employeur de rémunérer l’expert désigné par le CSE pour l’assister dans l’examen du rapport relatif à l’accord de participation) ou des pouvoirs dont il dispose (notamment en terme d’accès à l’information).
S’agissant justement du périmètre d’intervention de l’expert-comptable lorsque l’entreprise appartient à un groupe, la Cour de cassation confirme que l’expert dispose de prérogatives extrêmement larges (Cass. Soc., 1er juin 2023, n°21-23.393).
Dans le cas d’espèce, le CSE d’une entreprise basée en France avait désigné un expert-comptable pour l’accompagner lors de sa consultation sur la situation économique et financière de la Société. Cette dernière avait contesté devant les juridictions civiles les modalités d’intervention de l’expert-comptable. Elle faisait notamment valoir que sa lettre de mission dépassait le cadre du recours à l’expertise prévue par la Loi. A ce titre, la Société soutenait que la mission de l’expert-comptable désigné par le CSE devait nécessairement être circonscrite au périmètre de l’entreprise et ne saurait s’étendre à tout ou partie du groupe auquel la Société appartient.
Au terme d’un raisonnement à tiroirs, la Cour de cassation rejette un tel argument et confirme que l’expert-comptable peut étendre ses investigations au-delà du seul périmètre de l’entreprise lorsque cette dernière appartient à un groupe. A ce titre, la Cour de cassation rappelle que :
- l’analyse combinée des articles L. 2315-89 et L. 2315-90 du Code du travail doit conduire à octroyer à l’expert-comptable désigné par le CSE un accès aux mêmes documents que le commissaire aux comptes de l’entreprise et ce, afin qu’il puisse disposer d’un large degré de compréhension des comptes et puisse apprécier pleinement la situation de l’entreprise ;
- les textes relatifs aux missions des commissaires aux comptes (articles L. 823-13 et suivants du Code de commerce) confèrent à ces derniers un large pouvoir d’investigation dès lors qu’ils sont habilités à mener leurs investigations auprès de l’ensemble des entités comprises dans le périmètre de consolidation.
La Cour de cassation en déduit donc que la mission d’expertise pour l’examen de la situation économique et financière de l’entreprise pouvait conduire l’expert-comptable à solliciter un certain nombre de documents afférents à la situation du groupe et ce, peu important d’ailleurs que les autres entités soient situées à l’étranger.
Rappelons que la Cour de cassation admet pour seule limite au pouvoir d’accès aux documents de l’expert-comptable le fait que celui-ci ne saurait solliciter la communication de documents qui n’existent pas et dont l’établissement n’est pas obligatoire pour l’entreprise.