Un arrêt rendu le 29 décembre dernier par le Conseil d’Etat (n°463794) apporte des précisions importantes sur la marge de manœuvre dont disposent les sociétés appartenant à une Unité Economique et Sociale (ci-après « UES ») dans le cadre de l’élaboration d’un Plan de Sauvegarde de l’Emploi (“PSE”).
En l’espèce, la société l’Equipe et la société Presse Sport Investissement (dite « PSI »), appartenant toutes deux à l’UES l’Equipe, ont chacune procédé à l’élaboration par voie unilatérale d’un PSE. La première fondait son projet sur la sauvegarde de la compétitivité, là où la seconde se prévalait de difficultés économiques conduisant à la cessation de son activité.
Après avoir procédé à l’information-consultation du CSE de l’UES pour chacun des deux plans, les sociétés concernées les ont soumis à l’administration pour homologation.
Le CSE de l’UES a contesté l’homologation administrative en saisissant le juge administratif.
Le projet de réorganisation avait été décidé au niveau de l’UES. Selon le CSE, cela impliquait qu’il aurait dû être consulté dans le cadre d’une unique procédure conduisant à l’élaboration d’un seul PSE commun.
Le Conseil d’Etat ne s’était pas prononcé sur la question jusqu’à présent, même s’il admettait qu’un PSE commun à l’UES puisse être mis en place, y compris par voie unilatérale (CE 13 décembre 2019 n°404556).
De son côté, la Cour de cassation précisait qu’il fallait se placer au niveau de l’UES pour apprécier si les conditions d’effectif et de nombre de licenciements déclenchant l’obligation d’établir un PSE étaient remplies, dès lors que la décision avait été prise au niveau de l’UES (Cass. Soc. 16 novembre 2010 n°09-69.485).
Dès lors, la question se posait : les sociétés appartenant à une UES avaient-elles l’obligation d’établir un PSE commun, « de la jouer collectif » ? Ou avaient-elles la faculté d’établir un PSE à leur niveau, « de la jouer perso » en somme ?
Le Conseil d’Etat rejette l’argument du CSE en considérant que : « l’existence d’une unité économique et sociale à laquelle appartiennent la société PSI et la société l’Equipe ne faisait pas obstacle (…) à ce que des projets de réorganisation de chacune des sociétés, motivés, pour le premier, par une cessation anticipée d’activité, pour le second, par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise, soient conduits de façon concomitante et donnent lieu à l’établissement de documents unilatéraux portant plan de sauvegarde de l’emploi distincts, propres à chaque société ».
Ainsi, pour la Haute Juridiction administrative, en cas de PSE au sein de l’UES, les sociétés peuvent « la jouer collectif comme la jouer perso ». Néanmoins, il est important de souligner un point ici, les PSE des deux sociétés étaient fondés sur des motifs distincts : sauvegarde de la compétitivité pour l’une, difficultés économiques entraînant une cessation d’activité pour l’autre. Si tel n’avait pas été le cas le Conseil d’Etat leur aurait-il accordé la faculté d’établir à chacune leur propre PSE ?