Lors d’une opération de fusion-absorption, les contrats de travail en vigueur dans l’entreprise absorbée sont automatiquement transférés à l’entreprise absorbante en vertu de l’article L. 1224-1 du Code du travail. Le sort des normes collectives est parfois moins clair.
La Cour de cassation a récemment apporté des précisions sur l’applicabilité des engagements unilatéraux de l’entreprise absorbante aux salariés transférés. L’occasion de faire le point sur les règles applicables en la matière.
- Applicabilité des règles de l’entreprise absorbée aux salariés transférés
Les accords collectifs de l’entreprise absorbée sont automatiquement mis en cause : ils cesseront ainsi de s’appliquer à l’issue d’un délai de survie fixé, sauf exceptions, à 15 mois (C. trav., art. L. 2261-14). Ainsi, pendant cette période de survie, les salariés transférés continueront à bénéficier des avantages prévus par les accords collectifs de l’entité absorbée. Cette règle vaut pour la Convention collective applicable, sauf à ce qu’elle soit également applicable à l’entité absorbante.
Les droits et avantages collectifs, issus d’usages, d’accords atypiques ou d’engagements unilatéraux applicables au sein de l’entité absorbée au jour du transfert, sont automatiquement repris par l’entité absorbante. Sauf dénonciation, ils continueront en conséquence à s’appliquer dans l’entité absorbante aux salariés transférés, sans limitation de durée (Cass. soc., 12 mars 2008, n°06-45.147). Seuls les salariés transférés pourront toutefois bénéficier de ces règles, cette différence de traitement étant considérée justifiée (Cass. soc., 11 janvier 2012, n°10-14.614).
En revanche, le règlement intérieur de l’entreprise absorbée n’est pas transféré à l’absorbante (Cass. soc., 17 octobre 2018, n°17-16.465). Il cessera donc de s’appliquer dès la réalisation de l’opération.
- Applicabilité des règles de l’entreprise absorbante aux salariés transférés
Les salariés transférés bénéficient des dispositions les plus favorables entre les accords collectifs de l’entreprise absorbée – durant leur période de survie – et les accords collectifs de l’entité absorbante (Cass. soc., 24 janvier 1996, n°93-40.745). Cette règle est d’ordre public et ne peut être subordonnée à aucune condition particulière (Cass. soc., 13 octobre 2016, n°14-25.411).
La Cour de cassation vient de confirmer ce principe, énonçant que « l’employeur ne peut refuser aux salariés transférés le bénéfice, dans l’entreprise d’accueil, des avantages collectifs, qu’ils soient instaurés par voie d’accords collectifs, d’usages ou d’un engagement unilatéral de l’employeur, au motif que ces salariés tiennent des droits d’un usage ou d’un engagement unilatéral en vigueur dans leur entreprise d’origine au jour du transfert ou des avantages individuels acquis en cas de mise en cause d’un accord collectif » (Cass. soc., 22 mai 2024, n°22-14.984).
L’application de l’article L. 1224-1 implique donc, à l’égard des salariés transférés, non seulement le maintien des avantages collectifs issus de l’entreprise d’origine mais également l’application de ceux applicables au sein de l’entreprise d’accueil.
Notons qu’il est possible d’aménager ces règles par la conclusion d’accords de substitution ou de transition (anticipés ou non).