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ALCOOL ET TRAVAIL : UN MELANGE DANGEREUX

La décision rendue par la Cour de cassation le 6 décembre dernier est l’occasion de rappeler les principes applicables en matière de contrôle d’alcoolémie en entreprise.

  1. Rappel des principes

En principe, selon une jurisprudence constance de la Cour de cassation (notamment 24 février 2004, n°01-47.000), l’employeur peut procéder à un contrôle d’alcoolémie au sein de l’entreprise, à condition que :

  • Le règlement intérieur le prévoie ;
  • Une contestation du résultat de ce contrôle soit possible (par ex. par la possibilité de demander une contre-expertise) ;
  • Ce contrôle soit justifié par la nature des fonctions exercées par le salarié et que l’état d’ébriété présente un danger pour lui ou ses collègues.

En général, ces contrôles sont réalisés pour des métiers pour lesquels la sécurité est une composante essentielle, tels que les conducteurs de transport publics ou les ouvriers manipulant des machines.

  1. Contexte de la décision

En l’espèce, un salarié de la RATP occupant le poste de chauffeur de bus a fait l’objet d’un contrôle d’alcoolémie à sa prise de poste le 24 novembre 20215 montrant un taux d’alcoolémie de 0,28 gramme par litre de sang.

L’article 6-2 du règlement intérieur de la RATP prévoit effectivement que :

« Les salariés conduisant un véhicule, une machine dangereuse, manipulant des produits ou des outils dangereux, ou exerçant en tout état un « métier/fonction de sécurité » pourront faire l’objet d’un contrôle d’alcoolémie pour vérifier la présomption d’imprégnation ou d’un test de dépistage de stupéfiants. […] ; le salarié pourra demander une contre-expertise. »

Par la suite, le 6 décembre 2015, soit plusieurs jours après ce contrôle positif, le salarié a sollicité qu’il soit procédé à un examen sanguin à titre de contre-expertise. L’employeur a refusé.

Le salarié, licencié pour faute, a contesté son licenciement devant le Conseil de Prud’hommes au regard du refus de l’employeur de procéder à une contre-expertise en violation des termes du règlement intérieur.

La Cour d’appel a rejeté les demandes du salarié et considéré que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse.

  1. La décision et sa portée

La Cour de cassation a approuvé la décision des juges du fond retenant que :

  • L’objet de la contre-expertise est de permettre au salarié de contester les résultats du contrôle d’alcoolémie, ce qui impose que cette contre-expertise soit réalisée à très bref délai après le contrôle initial ;
  • Le salarié n’avait pas sollicité cette contre-expertise dans les suites immédiates du contrôle ;
  • Ainsi, aucune conséquence ne peut être tirée du refus de l’employeur de procéder à une contre-expertise plusieurs jours après le contrôle initial.

En conclusion, la contre-expertise doit être sollicitée par le salarié à bref délai pour permettre un contrôle effectif des résultats du test réalise à l’initiative de l’employeur.

Cass. Soc. 6 décembre 2023, n°22-13460