Un courriel de rappel à l’ordre ne constitue pas une sanction 

A l’image d’un justiciable qui ne peut pas être condamné deux fois pour les mêmes faits en droit pénal, un salarié ne peut – en droit disciplinaire – être sanctionné deux fois pour les mêmes faits.

Déterminer si le salarié a déjà été sanctionné peut cependant s’avérer complexe dans la mesure où le Code du travail donne une définition assez large de ce qu’est une sanction disciplinaire, à savoir : « toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération ». Si l’employeur adresse par écrit des reproches au salarié tout en lui intimant de modifier son comportement, la jurisprudence qualifiera cet écrit d’avertissement. Or, l’avertissement est une sanction. De ce fait, l’employeur qui en est l’auteur aura épuisé son pouvoir disciplinaire et ne pourra pas sanctionner une nouvelle fois le salarié pour ces mêmes faits.

Dans un arrêt récent, la Chambre sociale de la Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur un courriel adressé par l’employeur à un salarié.

Faits

Un salarié soutenait que son licenciement pour faute grave était sans cause réelle et sérieuse dans la mesure où l’employeur l’avait déjà sanctionné par l’envoi d’un e-mail avant de le licencier pour les mêmes faits.

La Cour d’appel le déboute de sa demande. En conséquence, le salarié se pourvoit en cassation.

Réponse de la Cour de cassation

La Cour de cassation se borne à approuver les juges du fond qui ont relevé que le courriel litigieux par lequel l’employeur, qui n’a pris aucune mesure à l’encontre du salarié, se bornait à lui demander de faire preuve de respect à son égard, de cesser d’être agressif et de faire preuve de jugements moraux, ainsi que de cesser de colporter des rumeurs et autres dénigrements auprès de la clientèle et des autres salariés. Ce faisant, le courriel litigieux constituait un rappel à l’ordre et non une sanction disciplinaire.

Cass. soc., 20 mars 2024, 22-14.465